Michael Reeves, Thomas Rabaud (pigiste pour CBD Mag) et Yann
Maillot sont trois amis, passionnés de longue date par le cannabis. Forcément,
ils ont suivi de près l’ascension du CBD dans notre pays, allant jusqu’à mettre
les mains dans la terre chez certains producteurs lors des périodes de récolte.
Tous trois ont fondé l’association Platinum CBD dans le but de créer un
évènement annuel destiné à la rencontre et à la promotion des producteurs de
fleurs de chanvre naturelles. La première édition se tiendra le 20 mai
prochain, à l’Agronaute, ferme urbaine située à Nantes. Pour en savoir plus sur
cet évènement historique, nous avons rencontré le président de l’association,
Yann Maillot. Ce développeur web de 36 ans, modérateur sur le forum Cannaweed,
a répondu à nos questions, sans détour, et en mettant systématiquement en avant
la clé de voûte de cette première CBD Cup française : l’éthique.
Ces derniers mois, de nombreuses personnes ont essayé d’organiser une compétition autour du chanvre bien-être, sans succès. Comment avez-vous réussi à fédérer suffisamment d’acteurs pour y parvenir ?
Déjà, on n’a pas cherché à fédérer tout le monde, mais juste les gens qui sont de vrais passionnés, et qui ont une éthique de travail. En France, ils sont de plus en plus nombreux, bien qu’un peu en marge à l’heure actuelle. Et on a voulu rassembler tous ces acteurs lors de notre évènement. On a été honnêtes, on a partagé notre vision du marché, et on est super contents parce que du côté de ces producteurs, il y avait une vraie envie de se retrouver autour d’une éthique commune. Lorsque j’ai travaillé chez un cultivateur lors d’une récolte, j’ai pu m’apercevoir qu’il y avait un manque de connaissance, et parfois beaucoup d’opportunisme. Cela fait que, sur le marché, il y a de nombreux produits que l’on n’a vraiment pas envie de recommander. Et on pense au consommateur, qui ne dispose que de très peu de moyens pour s’y retrouver. Il y a tout un travail de vulgarisation à faire sur le public. C’est ce que l’on essaie de faire à travers des conférences qui se dérouleront lors de la Cup.
Quelles seront les thématiques de ces conférences ?
Nous organisons deux conférences : une sur le terroir et son impact sur les qualités organoleptiques des plantes, et la seconde sur l’aspect législatif et politique du CBD, l’avenir de la filière etc.
Sur la conférence terroir, il y aura Jonathan Dartois, créateur de Pinnacle solutions et expert du living soil ; Maël Marcellin, gérant de La ferme des belles plantes, master grower et ingénieur agronome ; et Maxime Bordelot, sommelier et créateur du vin “Brume”.
Quant à celle sur l’aspect légal et politique, interviendront Soïc Gay-Pereira, de CIDS et nouveau président du SPC ; François-Michel Lambert, ancien député, défenseur du cannabis et auteur du livre “Cannabis ecce homo“ ; et Nicolas Hachet, avocat au barreau de Bordeaux, qui défend notamment les consommateurs.
On est vraiment très fiers d’avoir pu attirer ces intervenants dès cette première édition de notre évènement ! Outre ces conférences, il y aura aussi des stands de vente directe, où des producteurs de chanvre, des fabricants d’engrais et quelques-uns de matériel de culture proposeront leurs gammes au public.
« Le leitmotiv de la cup, c’est l’éthique »
Le “main event” de ce weekend sera indéniablement la Cup. Quel a été votre cahier des charges dans la sélection des produits en lice ?
Les fleurs washées ne sont pas autorisées. Si on a le moindre doute, ça part au laboratoire, où l’on fait aussi des analyses terpéniques pour déterminer s’il y a eu des terpènes ajoutés. Il en va de même pour les fleurs sur lesquelles de l’isolat a été rajouté. Et quand bien même il s’agirait de sommités dont le taux de THC a été rabaissé au CO2 supercritique, l’essence même de la fleur aurait été retirée : ce serait une coquille vide en fait. Déjà que le CBD produit très peu d’effets, si en plus, on enlève le côté gustatif, au final, il reste quoi ?
Cela veut-il dire qu’il n’y aura pas de HHC lors de votre évènement ?
Chez nous, c’est clairement banni. Déjà, parce que l’on sait que les méthodes pour synthétiser le HHC et les produits qui sont utilisés, notamment les solvants, sont potentiellement interdits en France. Ce n’est donc pas très légal. Les cannabinoïdes de synthèse, on ne connait pas trop leurs effets, et on sait que le cannabis fonctionne de manière synergique, avec de nombreuses molécules qui interagissent les unes avec les autres. On comprend l’engouement autour de ce produit, mais il n’est suscité que par le fait que le THC soit interdit en France. Et on a vu ce que ça a donné, notamment aux USA, dans les États où le THC est interdit, que ce soit avec le Δ8-THC, ou en ce moment avec le “rapid absorption formula” qui est en train d’arriver… Pas de ça chez nous !
Quels sont les produits sélectionnés, et comment sont-ils catégorisés ?
Ne pourrons concourir que les fleurs à vaporiser (ou à fumer), les hash, et les produits comestibles. On voulait aussi intégrer les cartouches de vape, mais il n’y avait malheureusement pas assez de participants dans cette catégorie. Nous voulons que cette Cup soit représentative et cohérente, donc nous n’avons ouvert chaque catégorie que dès lors qu’elle met en compétition cinq participants au minimum. Ainsi, le concours est divisé en sept catégories. Trois pour le CBD : indoor, greenhouse et outdoor ; deux pour le CBG : outdoor et greenhouse ; une pour le hash ; et une pour les produits comestibles, essentiellement du miel et des gummies.
Avec des critères de sélection aussi drastiques, n’a-t-il pas été compliqué de trouver assez de participants ?
Honnêtement, surtout pour une première, ça a bien marché. Une quarantaine de produits, confectionnés par vingt-cinq producteurs, sont en compétition. Sur les vingt-cinq producteurs qui participent à la Cup, la quasi-totalité travaille de manière organique ou en living soil, que ce soit en outdoor, indoor ou greenhouse. On n’est pas fermés sur le mode de production. Certaines personnes ne sont pas trop pour l’indoor, pour des raisons de dépense énergétique, d’empreinte carbone etc. On respecte évidemment cela, mais nous restons ouverts sur ce procédé de culture.
« Nous voulons uniquement des produits naturels : pas de minéral, pas de washing, pas de terpènes ajoutés… »
Quels sont les critères de notation ?
Les jurés ont observé les produits sous trois angles : visuel, olfactif et gustatif.
Pour l’aspect visuel, les critères sont la taille des calices, la qualité de la trim et des trichomes, et la présence éventuelle de corps étrangers. Sur l’aspect olfactif, ils ont jugé la puissance, la qualité et l’originalité. Enfin, concernant l’aspect gustatif, ils ont eu un œil attentif sur la texture des volutes (vapeur ou fumée), la fidélité à l’odeur, l’agréabilité et la persistance.
Pour les edibles (produits comestibles), la fiche de notation diffère un peu. Pour l’aspect visuel, on a demandé au jury de noter l’originalité de la recette – est-ce appétissant ? – et la présence ou non de corps étrangers ; pour l’odeur, ils se sont attardés sur l’agréabilité et sur le fait que les produits sentent le cannabis ; et pour le goût, ils ont aussi jugé à quel point l’association du chanvre matche bien avec les autres ingrédients de la recette.
Quid du matériel de vaporisation ? Les jurés utiliseront-ils des vaporisateurs pour leurs tests ? Et pourquoi ne pas avoir mis du matériel de vaporisation en compétition ?
On aurait voulu que tout le monde vaporise, car on estime que c’est le meilleur moyen pour tester les terpènes. Après, tout le monde n’est pas forcément adepte de la vaporisation, donc on a laissé ouvert, tout en préconisant davantage la vape. Et puis, c’est aussi plus représentatif de la population générale qui fume plus qu’elle ne vaporise. De plus, dans l’idéal, tous les jurés auraient utilisé le même matériel. Mais on n’a pas encore réussi à monter de partenariat avec une marque de vaporisateurs.
Quant à la catégorie “vaporisateurs”, nous y réfléchissons sérieusement pour les prochaines éditions, tout comme les cartridges de vape et les graines. Mais on n’est que trois à l’organisation, c’est notre première année, ça a demandé énormément de temps et de travail, et les gens ne nous connaissaient pas forcément…
Enfin, question qui vaut de l’or : quels sont les jurés et les marques sélectionnés pour cette CBD Cup ?
Toujours pour garantir notre cadre éthique, on veut éviter qu’il y ait des conflits d’intérêt, de la corruption… Du coup, on n’a dévoilé ni le nom des jurys, ni celui des participants, avant d’avoir les notes. Maintenant que nous avons les résultats, nous pouvons communiquer le nom de nos neuf jurés professionnels : Jimi Reggaeseeds, qui est breeder ; Victor, de French touch seeds ; Matthias Ghidossi de Swiss cannabinoid ; Aladdin de Khalifa genetics ; Kim Bercet, co-fondatrice de Miuk. ; Coline Grueau, qui est sommelière, tout comme Xavier Desutter ; Léo Siddhartha, gérant d’un seeds et CBD shop ; et enfin, un testeur anonyme de CBD crash test.
De plus, nous avons mis en vente des “Jury box”, à destination du public, afin qu’il puisse lui aussi participer à l’évaluation des produits. Elles sont composées des 48 échantillons en lice pour la Cup.♦
Quant aux marques sélectionnées, on pourrait vous le dire… Mais ce serait gâcher la surprise ! Rendez-vous donc, dimanche, à Nantes. Et que les meilleurs gagnent !